lundi , 29 mai 2023
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Salwa Hamrouni : les “innovations” du projet présidentiel ont été un échec dans le passé

La professeure de droit constitutionnel et présidente de l’Association tunisienne de droit constitutionnel (ATDC), Salwa Hamrouni a affirmé que le président de la République, Kaïs Saïed a élaboré une loi électorale sur-mesure et visant à servir les intérêts de son propre projet politique. Elle a estimé que le décret électoral montrait ses intentions de fragiliser le pouvoir législatif et que ce texte ne respectait pas le seuil minimal en matière électorale. « Il n’y a pas de sanctions relatives aux infractions électorales visant le président de la République même au sujet du financement étranger. Seuls les députés sont sanctionnés dans ce cas de figure », a-t-elle dit.

 

Invitée le 22 septembre 2022 par Elyes Gharbi sur les ondes de la radio Mosaïque Fm, Salw Hamrouny a considéré que le projet du président de la République ne comportait aucune innovation. Elle a précisé que le mécanisme de retrait de confiance d’un élu avait été mis en place puis abandonné dans plusieurs pays en raison de son inefficacité. Cette mesure remonte au 18ème siècle. Le projet du chef de l’Etat, selon elle, représente des expériences ayant démontré leurs défaillances dans le passé. Elle a assuré que le code électoral n’allait pas mettre fin aux pratiques concrétisant la corruption et le recours à l’argent sale. Elle est revenue sur l’absence de prérogatives du prochain parlement et le lien entre les députés. Elle a pointé du doigt l’évincement de l’appartenance partisane ou idéologique. Cette approche vise à faire de l’assemblée une simple chambre d’enregistrement, c’est-à-dire, une chambre parlementaire sans rôle et sans influence notable sur la vie politique.

 

« La réglementation de la vie politique peut avoir lieu à travers le règlement intérieur du parlement. Plusieurs pays ont procédé à la mise en place de normes relatives à la vie politique et au rôle de député et sans porter atteinte au rôle des élus… Même ceux n’ayant pas soutenu le président ne voulaient plus avoir affaire à l’Assemblée des représentants du peuple de 2019… La Tunisie est dotée d’un arsenal de lois permettant de lutter contre les rumeurs, la violence à l’égard des femmes ou les conflits d’intérêts… Il ne s’agit pas d’une question de textes juridiques, mais de l’application de la loi et de la volonté politique… L’assemblée avait refusé de prendre au sérieux les demandes de levée d’immunité visant certains élus… Il y avait des lois servant seulement à faire joli aux yeux de la scène internationale », a-t-elle déclaré.

 

Salwa Hamrouni s’est interrogée sur les mécanismes à adopter afin de procéder à l’élection du président du parlement et de la répartition des élus sur les commissions. Elle a expliqué que les députés, dans d’autres pays, élus suite à un scrutin uninominal formaient facilement des alliances en raison de leurs appartenances idéologiques et partisanes.

 

Par la suite, la professeure de droit a considéré que la légitimité de Kaïs Saïed avait été éthiquement entachée puisqu’il avait juré de protéger la constitution de 2014 et de veiller à son application. Elle a considéré que le chef de l’Etat pouvait envisager la tenue d’une élection présidentielle anticipée afin de mettre fin à tout soupçon au sujet de sa popularité. Mme. Hamrouni a souligné l’absence de réponse quant à la prise en considération du mandat actuel de Kaïs Saïed. Elle a affirmé que l’absence d’une cour constitutionnelle montrait les véritables intentions du chef de l’Etat. La professeure de droit a évoqué la réinstauration de l’Instance provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des projets de loi (IPCCPL). Elle s’est interrogée sur les raisons de sa dissolution. Kaïs Saïed  peut, selon elle, agir en toute liberté et aller même jusqu’à enfreindre sa propre constitution. L’absence d’autorité de contrôle immunise ses décrets et ses décisions. Elle a affirmé qu’une autorité de contrôle de constitutionnalité aurait annulé le décret électoral actuel.

Salwa Hamrouni a estimé que l’élection des membres du parlement pouvait signifier la fin de l’état d’exception. Néanmoins, elle a rappelé que le président de la République pourrait considérer que la levée des mesures exceptionnelles dépendait de plusieurs autres facteurs tels que la création du Conseil national des régions et des districts. Par la suite, elle a mis en garde contre le boycott d’une grande partie des acteurs de la scène politique et de la société civile. Elle a affirmé que cette situation pourrait nous ramener vers une situation similaire à celle d’avant le 14 janvier 2011.

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