Les résultats des élections du nouveau Conseil municipal du Bardo tenues les 13 et 14 juillet courant ont levé le voile sur certaines vérités. Des vérités qui, certes, n’ont pas été surprenantes mais qui ont révélé l’indifférence des électeurs à travers un taux d’abstention trop élevé. Ces résultats ont aussi prouvé qu’encore une fois, ce sont les partis progressistes qui ont tiré la courte paille face à Ennahdha qui, par contre, semble demeurer insensible aux tumultes politiques.
Le Conseil municipal de Bardo vient d’être élu pour la seconde fois après sa dissolution annoncée en avril 2019. 18 conseillers municipaux de la mairie du Bardo avaient en effet déposé leur démission en mars dernier expliquant leur décision par l’impossibilité de travailler avec la présidente du Conseil municipal.
Une présidente accusée, de la part de ces conseillers, de mauvaise gestion et de corruption, des allégations qui nuisent, selon eux, à l’intérêt général pouvant éventuellement les discréditer.
Ainsi, le Conseil municipal a été officiellement dissous suite à cette démission collective en dépit de la contestation de certains conseillers. Ces opposants ont d’ailleurs affirmé qu’ils n’ont reçu aucun avis à propos d’une démission réitérant leur attachement à leur fonction.
Ils ont également appelé à considérer les démissions en tant qu’acte individuel, préconisant la substitution des démissionnaires par leurs successeurs dans les listes électorales.
C’est dans ce sens que l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) a décidé d’organiser des élections partielles afin d’élire un nouveau Conseil municipal au Bardo.
Des élections qui se sont déroulées les 13 et 14 juillet courant respectivement pour les forces de l’ordre et des civils.
Le taux de participation des militaires et sécuritaires a atteint 3,64% contre 13,1% lors des dernières élections alors que celui des civils a atteint 11,66% à la fermeture des 82 bureaux de vote. Un taux d’abstention record avec seuls 5202 votants sur 44626 inscrits démontrant l’indolence, la lassitude et la perte de confiance des citoyens en la classe politique ou encore en un véritable changement concret.
Un phénomène qui n’est pas inhabituel dans cette démocratie naissante. Le taux de participation national aux élections municipales tenue le 6 mai dernier avait atteint 34,4% soit 1.796.154 électeurs ayant accordé leurs voix aux listes candidates.
Un chiffre qui pourrait se reproduire lors des échéances électorales législatives et présidentielle à venir. Malgré la prorogation des délais d’inscription par l’Isie et des prémices d’un taux de participation respectable avec 6.800.000 inscrits, au regard de l’indifférence croissante des Tunisiens désabusés par les politiques, de leur désespoir et de leur dégoût notable du paysage politique pour le moins décevant, l’abstention serait le scénario le plus probable.
L’insatisfaction des programmes des candidats, la désillusion des électeurs convaincus que leur voix ne changera rien à la conjoncture actuelle, ou encore le sentiment de détachement aux candidats qui ne les représentent pas ne sont que quelques motifs derrière le fléau d’abstention qui s’aggrave de plus en plus.
Il s’agit ainsi d’une abstention conjoncturelle mis à part l’abstention involontaire qui n’exprime pas une position idéologique, mais est plutôt le résultat d’un faible niveau d’information, ainsi que l’abstention structurelle qui consiste à un choix conscient par principe.
Si les résultats de l’élection du premier Conseil municipal du Bardo qui avait vu la victoire d’Ennahdha étaient serrés entre le parti islamiste ayant remporté 8 sièges et Nidaa Tounes en deuxième position avec 6 sièges, ces nouvelles élections ont témoigné de la prééminence d’Ennahdha devant ses rivaux en dépit d’éventuelles tentatives d’influencer les électeurs et les agissements de certains partis au pouvoir autour des bureaux de vote au Bardo dénoncés par le président de Beni Watani, Saïd Aïdi.
Avec également 8 sièges sur 30, Ennahdha occupe la première place avec 23,38% des voix exprimées. Toutefois, les résultats pour les neuf autres listes en lice dont 4 indépendantes sont cette fois-ci différents de ceux précédents.
Selon la répartition préliminaire des sièges au sein du Conseil, Al Badil Ettounsi vient en deuxième position avec 12,4% soit 4 sièges. 4 sièges, par ailleurs, ont été accordés à Afek Tounes avec 11,96% des votes. Tahya Tounes en quatrième position avec 11,14% des votes et 3 sièges et Beni Watani a remporté 2 sièges avec 5,91% des voix.
Ainsi des alliances entre les différents protagonistes s’imposent à présent en vue d’élire le nouveau président du Conseil municipal du Bardo. Cette alliance ne doit pas être établie avec les partis au pouvoir et principalement avec Ennahdha, estime le porte-parole d’Al Badil Ettounsi, Mohamed Ali Toumi.
Il ne s’agit pas de la première victoire d’Ennahdha aux municipales partielles. Le parti islamiste s’est aussi classé en tête des résultats des élections de Souk Jedid dans le gouvernorat de Sidi Bouzid tenue en mai dernier. Une victoire réalisée avec 640 voix sur 4078 électeurs alors que Tahya Tounes est venu à l’avant-dernière position.
Encore une fois, Ennahdha assure son statut en tant qu’un parti politique organisé et bien structuré comparé aux partis progressistes et modernistes qui se retrouvent divisés et désunis.
Devant un Nidaa secoué par d’innombrables fissures et fragilisé par des conflits internes malgré les tentatives d’unification avec le reste de la famille centriste, démocrate et moderniste éparpillée et face à l’implosion du Front populaire, Ennahdha continuera à vaincre haut la main.
La bataille des progressistes pour la survie est plus virulente que jamais à l’approche des élections. Cependant, même avec les coalitions déjà existantes et celles envisageables, la mission de la famille centriste de rétablir l’équilibre sur la scène politique n’a pas l’air facile d’autant plus que les partis faisant partie de cette famille, séparément, n’ont aucune chance de remporter les législatives comme le prouvent les derniers sondages d’opinion.
Des sondages qui ont, néanmoins, démontré la montée en force du patron de Nessma TV et candidat à la présidentielle, Nabil Karoui ainsi que de son parti « Au cœur de la Tunisie ».
D’après les plus récentes intentions de vote communiquées dans le cadre de deux différents sondages d’opinion à savoir celui de Sigma Conseil et d’Emrhod Consulting, Nabil Karoui a obtenu 23% alors que son parti a récolté 29% selon les données de Sigma Conseil.
Quant aux données d’Emrhod consulting, elles ont placé Nabil Karoui à la tête de ces intentions avec également 23%. Son parti a récolté 22,9% suivi par Ennahdha dans les deux sondages.
Pourtant, l’acceptation de la candidature de Nabil Karoui aussi bien que celle de son parti est toujours incertaine. Aujourd’hui, l’amendement de la nouvelle loi électorale, adopté le 18 juin dernier dans son intégralité avec 124 voix pour, a exclu M. Karoui ainsi que la fondatrice de l’association 3ich Tounsi, Olfa Terras.
La décision finale revient au chef de l’Etat, Béji Caïd Essebsi, promulguer le nouveau Code électoral, le renvoyer à l’Assemblée des représentants du peuple ou encore le soumettre au référendum. Sauf que le président de la République n’a toujours pas tranché laissant la porte ouverte à des pistes ambiguës..
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