Le double attentat suicide du 27 juin à Tunis, pour peu fréquent qu’il ait été au cours des dernières, n’en a pas moins souligné la nécessité qu’il y a pour les services de la sécurité de ne jamais lâcher prise, de poursuivre les terroristes jusque dans leurs derniers retranchements et de maintenir l’étau aussi serré que possible. Toutefois, les défis sécuritaires demeurent complexes, estime, en cette occurrence l’ISS (Institute fon Security Studies) dans une analyse livrée quelques jours après les deux attentats.
L’État doit éviter la tentation de se concentrer uniquement sur l’aspect technique dans sa lutte contre le terrorisme pour que tout soit mobilisé afin d’améliorer les conditions sociales, économiques, de gouvernance et idéologiques qui conduisent à la radicalisation et menacent la stabilité de la Tunisie, souligne ISS. Tout en attribuant la décrue de la violence dans les villes tunisiennes à l’accroissement des compétences techniques et de l’expérience des forces de sécurité, ainsi qu’à leur capacité à identifier et à arrêter les terroristes avant qu’ils ne frappent, l’Institut prévient que « à mesure que le gouvernement est devenu plus capable de traquer les terroristes, le travail est devenu plus difficile ». C’est que la synchronisation des attaques de jeudi est atypique en Tunisie. C’est un signe inquiétant que les cellules terroristes urbaines peuvent être de mieux en mieux organisées et de plus en plus capables sur le plan stratégique, même si elles échappent à l’attention des forces de sécurité, explique-t-il.
Daech s’étend vers le Sud
Les évaluations du terrorisme dans les zones urbaines et rurales de la Tunisie tendent à se concentrer sur les liens internationaux. Al-Qaïda se concentre sur la Tunisie depuis près de deux décennies, avec des combattants algériens et sahéliens actifs dans les montagnes occidentales. De même, de nombreux Tunisiens ont rejoint Daech en Syrie et un nombre croissant de combattants tunisiens étrangers sont rentrés chez eux.
Mais le fait de se concentrer sur les liens internationaux occulte la mesure dans laquelle le terrorisme en Tunisie est motivé par des facteurs locaux et vise des cibles locales. Les difficultés économiques de la Tunisie ne cessent de s’aggraver, dégradant la qualité de vie de nombreuses familles de la classe moyenne et ouvrière. Les politiciens n’ont pas apporté de changements efficaces ni amélioré la prestation des services. Cela conduit au cynisme et à la désillusion à l’égard de la démocratie.
Minimiser la menace, mais encore !
Des forces de sécurité mieux formées et mieux équipées ne peuvent que minimiser la menace, et non la combattre, affirme ISS qui pense que les facteurs locaux et la nature persistante du terrorisme en Tunisie soulignent que les attaques ne seront pas arrêtées par les seules forces de sécurité. Depuis 2015, le gouvernement, soutenu par des partenaires internationaux, a investi massivement dans le renforcement de la capacité des forces antiterroristes et de la police non spécialisée à découvrir le terrorisme et à y répondre. Mais, ajoute-t-il, des forces de sécurité mieux formées et mieux équipées ne peuvent que minimiser la menace, et non la combattre. Pour ce faire, il faut s’attaquer au malaise économique du pays, au système politique peu performant et à l’inégalité enracinée, des conditions qui alimentent les griefs de la société et incitent certains jeunes à se joindre aux groupes terroristes.
Bien qu’un certain nombre d’initiatives visant à prévenir l’extrémisme aient été prises par le gouvernement et les donateurs internationaux, beaucoup n’ont pas été coordonnées et ont eu une portée et un impact géographique limités. La prévention du terrorisme n’a pas bénéficié des ressources financières ou de l’intérêt soutenu du gouvernement pour le renforcement des capacités des forces de sécurité.
Il s’agit essentiellement de s’attaquer aux problèmes sous-jacents qui menacent la stabilité de la Tunisie. Rien de tout cela ne peut être fait rapidement ou facilement et exigera une patience stratégique considérable de la part des forces de sécurité qui ont historiquement dominé le processus décisionnel du gouvernement en matière de sécurité. C’est cependant la meilleure option pour s’assurer que les attaques ne continuent pas à s’intensifier, conclut ISS.
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