En vigueur de manière continue sur tout le territoire depuis l’attentat contre un bus de la garde présidentielle, le 24 novembre 2015, à Tunis, l’état d’urgence vient d’être prolongé une nouvelle fois par le président Béji Caïd Essebsi pour trois mois, jusqu’au 16 mai.
Cinquième recours dans l’histoire tunisienne
Cette décision, comme les autres qui l’ont précédée, se fonde sur un décret du 26 janvier 1978 du président de l’époque, Habib Bourguiba. La première proclamation de l’état d’urgence en Tunisie avait été décidée suite à une grève générale lancée par l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), surnommée le « Jeudi noir ».
D’une durée de 30 jours prorogeable par décret, le régime d’exception peut être déclaré en cas de « péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public » ou d’ « événements présentant par leur gravité le caractère de calamité publique ». Et ce fut déjà le cas cinq fois depuis 1978 dans l’histoire du pays.
Si le gouvernement avait initialement usé de l’état d’urgence pour répondre à des soulèvements populaires, les dernières applications sont plutôt justifiées par « les dangers qui menacent le pays », l’explique le chef de l’État. Avant l’attaque du 24 novembre 2015 (12 morts), deux autres attentats avaient été revendiquées par le groupe État islamique (EI) la même année : un au Musée du Bardo en mars (22 morts) et un autre à l’hôtel de Sousse fin juin (38 morts).
Une mesure contestée
Une partie de la société civile et des médias tunisiens s’inquiètent néanmoins des dérives qui accompagnent – ou peuvent accompagner – la mise en place de l’état d’urgence, et remettent en cause les libertés des citoyens.
Dans un rapport publié le 13 février, Amnesty International va même jusqu’à dénoncer un « sinistre rappel du régime » de Zine el-Abidine Ben Ali, en faisant état de « 23 cas de torture et mauvais traitements depuis janvier 2015 », de l’arrestation de « milliers de personnes », et de perquisitions souvent « en l’absence de mandat judiciaire ». « Au moins 5 000 » personnes se seraient également vu « interdire de voyager » depuis que l’état d’urgence a été réinstauré.